Carbone suie (Black carbon)

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Le carbone suie, également connu sous le nom de « noir de carbone » ou « carbone noir », faisant directement référence à son nom anglais « Black Carbon », n’attire l’attention de la communauté scientifique que depuis quelques années.

L’élan d’intérêt porté à ce composé chimique, résulte à la fois de ses effets climatiques et sanitaires. A l’image du dioxyde de carbone (CO2), du méthane(CH4) ou de l’ozone troposphérique (O3), le carbone suie  est classé parmi les forceurs climatiques, autrement dit, le carbone suie agit  sur le climat, en réchauffant l’atmosphère, participant ainsi au changement climatique. Il peut également être retrouvé à l’état de particules dans l’air ambiant. Or l’Organisation Mondial de la Santé, rappelle que les particules en suspension ont plus d’effets sur la santé que tout autre polluant. Les effets sanitaires du carbone suie seraient similaires aux particules classées PM 2,5 (diamètre inférieur à 2,5µm). Elles sont, entre autres, responsables d’inflammations du tractus nasopharyngé, de maladies respiratoires obstructives chroniques et de cancers du poumon.

La carbone suie est resté dans l’ombre de nombreuses années, à cause de sa double classification. En effet il fait à la fois partie des composés chimiques ayant un pouvoir radiatif et il constitue également une fraction importante des particules. Or les forceurs climatiques responsables de l’effet de serre et les particules sont traités indépendamment l’un de l’autre (ex : valeurs d’émissions). Les premiers sont caractérisés par leurs propriétés chimiques, alors que les particules sont classées selon leur propriété physique. Cependant, c’est également c’est double appartenance qui fait qu’aujourd’hui le carbone suie attire l’attention, car ses effets sont à la fois liés à ses propriétés chimiques et physiques.

 

  1. Le carbone suie : définition

Le carbone suie, n’a pas de définition stricto sensu et définitive. En effet, selon le domaine d’expertise des scientifiques (physique, chimie, toxicologie, etc.) les propriétés retenues pour le définir ne sont pas les mêmes. Néanmoins deux adjectifs sont actuellement utilisés pour le caractériser : il s’agit d’un composé de couleur noir, constitué de l’élément chimique carbone (C).

Sa couleur noir indique qu’il absorbe le rayonnement lumineux. Le carbone suie est donc capable d’influencer le bilan radiatif du système terre-atmosphère, en réchauffant l’atmosphère. Il est ainsi également appelé « forceur climatique ». Le carbone suie n’est pas à l’état gazeux, comme son homologue CO2, mais qu’il est présent sous forme d’aérosol (mélange avec d’autres particules), et que sa durée de vie dans l’atmosphère est de quelques jours à quelques semaines tout au plus, alors qu’à titre d’exemple le CO2 à une durée de vie de 100 ans. Ainsi à parité d’émission, le carbone suie provoque un pic de chaleur sur une courte durée, alors que le CO2 réchauffe durablement l’atmosphère.

 

  1. Effets sanitaires

Quant à ses impacts sanitaires, ils ont été mis en évidence récemment dans plusieurs publications scientifiques de 2012. Ses effets cancérigènes seraient lié à son mode d’émission, car il n’est pas émis sous forme pure (carbone élémentaire) mais en mélange. En effet le CNRS a démontré que le carbone élémentaire, par ses propriétés chimiques (carbone pure) n’est pas cancérigène pour l’homme. Excepté s’il se trouve à l’état de particules ultra fines ou nanoparticules, dans ce cas la toxicité ne dépend plus de ses propriétés chimiques mais de ses propriétés physiques (les nanoparticules peuvent traverser, de part en part les membranes cellulaires et susciter des mécanismes inflammatoires).

 

  1. Les sources d’émissions et mesures de réduction

Le carbone suie est une fraction majeure des particules issues de la combustion incomplètes d’énergie fossile (fuel) et de biomasse (bois). Il s’agit d’un sous-produit de combustion. Bien que les émissions de particules PM10 et PM2,5 aient considérablement diminué depuis les années 50, le niveau stagne depuis 15 ans ; en raison du caractère multi-sources des émissions de particules et des phénomènes post-émissions (particules secondaires et particules remise en suspension). Par conséquent, abaisser leur niveau d’émission devient de plus en plus difficile. De plus il ne faut pas négliger les émissions d’origine domestique.

  • Véhicules diesel

Ce composé chimique est largement émis par les gaz d’échappements des véhicules diesel. Toutefois il est important de signaler que les concentrations émises varient selon l’année de construction du véhicule et de la présence d’un filtre à particules. En effet les moteurs diesel les plus récents (euro 5) n’émettent pas plus de particules que les véhicules essence, et la présence d’un filtre à particules pour les autres véhicules abaisse significativement l’émission de carbone suie.

La recherche ne penche pas uniquement sur la détermination des impacts sanitaires et climatiques du carbone suie, elle s’intéresse également à limiter ou à réduire les émissions à la source, en s’attaquant directement aux émissions liées au transport. Par exemple, Nicolas Jeuland, de l’Institut Français du Pétrole et des énergies nouvelles, explique que dans le cadre de leur R&D, ils essaient de favoriser une combustion complète en jouant sur le système d’injection, la chambre de combustion, ou encore, en favorisant la recirculation des gaz d’échappements pour une seconde combustion. L’objectif est de maximiser le contact air-fuel pour une combustion complète et éviter la formation de carbone suie.

  • Transports maritimes

Alors que 90% du commerce international fait appel aux transports par voies maritimes, une étude publiée en 2007 rapporte que les émissions en particules liées aux navires marchands seraient responsables de la mort de 60 000 personnes par an. Cependant les émissions en carbone suie ne sont pas réglementées pour les bateaux, seules les PM (particules) totales le sont. Or Edmund Hugues, de l’Organisation Internationale Maritime, rappelle que le carbone suie, produit lors de la combustion incomplète des hydrocarbures, est le principal composant des particules. Depuis 2008, des travaux sont menés pour mesurer les émissions de carbone suie directement imputées aux transports maritimes, et pour essayer de mettre en place des mesures de contrôle d’émission dans les zones côtières.

  • Combustion de Biomasse

Toutefois il ne faut pas oublier que la combustion de biomasse est aussi un facteur de production de carbone suie et que les émissions domestiques dues à la combustion de bois ont un impact environnemental non négligeable. De plus, d’après l’OMS, chaque année plusieurs millions de décès sont directement liés à la pollution de l’air intérieur à cause de l’utilisation de combustibles solides (bois, fumier, etc.) dans les feux à foyer ouvert. Toute une technologie de poêle à bois et de cheminées dites « propres », reste encore à développer.

 

  1. Le carbone suie, un indicateur de la pollution en particules

Le carbone suie est actuellement en phase de test, pour être utilisé comme indicateur de la qualité de l’air. A terme il pourrait caractériser la pollution particulaire, en prenant en compte les émissions de particules primaires, c’est-à-dire les particules directement issues de la combustion d’énergie fossile. De plus, comme il a un impact non négligeable sur la santé humaine, l’utiliser comme indicateur de pollution, pourrait permettre d’évaluer le risque sanitaire encouru pour la population. Cependant des précisions au niveau de la métrologie doivent être apportées.

 

Source : Compte-rendu « La journée d’études internationale sur le carbone suie, au croisement des enjeux climatiques et de la qualité de l’air », organisée par le CITEPA, sous l’égide du Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie, avec le soutien et la participation de l’ADEME et de l’Office Fédéral Suisse de l’Environnement.

 

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