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Habitat

Construction, rénovation ou petits travaux: prenez en compte la qualité de l’air intérieur

Lors d’une construction ou d’une rénovation, le gros oeuvre est relativement neutre pour la qualité de l’air intérieur. C’est davantage le second oeuvre, les finitions qui vont avoir un impact plus ou moins important.

La ventilation joue également un rôle essentiel pour maîtriser la qualité de l’air. Elle est même décisive dans les bâtiments performants en énergie, où leur enveloppe étanche ne permet plus, par les fuites d’air parasites, de compenser l’absence ou le dysfonctionnement du système de ventilation.

1/ Les matériaux d’isolation

Peu importe qu’ils soient d’origine minérale ou végétale (ou même animale), le premier point essentiel auquel il faut prêter attention, concerne le conditionnement des isolants. Il est impératif que les matériaux aient été stockés dans un endroit sec ou protégés des intempéries. Un isolant humide présente le risque d’être contaminé par des moisissures.

D’ailleurs l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI) a souligné, que l’une des deux principales causes de développement fongique dans les bâtiments basse consommation, était liée à un conditionnement inadapté des isolants (non protégés, stockés dans un local humide et mal ventilé, exposés à la pluie sur le chantier…). La deuxième cause est la présence de ponts thermiques (rupture de l’isolation lors de leur pose). Ainsi près d’un logement sur deux est concerné (47%), contre 37% des logements conventionnels.

Par ailleurs, il est exagéré de dire que les matériaux bio-sourcés, également nommés écomatériaux ou encore matériaux écologiques, sont naturels. Ils font l’objet d’un traitement (ajout d’additifs), afin de les rendre imputrescible, ignifuge… Ces additifs peuvent s’inscrire dans la continuité d’obtenir un produit peu transformé, comme un mélange avec de la chaux (antifongique), de formulation chimique CaO (oxyde de calcium), ou bien il peut être traité avec du sel de bore, de formulation chimique H3BO(acide borique). C’est le cas généralement de la ouate de cellulose. Or le sel de bore est classé comme reprotoxique “peut nuire à la fertilité / peut nuire au développement du fœtus”. Il possède le pictogramme de danger suivant:

D’autres écomatériaux sont, par nature, antifongiques et/ou ignifuges, comme le liège par exemple, mais ils restent chers. Enfin, les laines minérales (laines de verre et de roche) possèdent ces mêmes propriétés. Moins cotées ces dernières années, elles n’en demeurent pas moins un bon rapport qualité/prix.

De manière générale, dès l’application de panneaux de fibres, que ce soit des laines minérales ou des fibres de bois, il est fortement conseillé de porter un masque de type FFP2 (minimum) et des lunettes de protection. De par leur petitesse ces fibres, végétales ou minérales, sont très irritantes pour les voies respiratoires. Enfin concernant les laines de verre et de roche, pour le moment le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) les a classées, en 2002, dans le groupe 3 “non classifiable, manque de données probantes“. Le danger provient de la présence de fibres réfractaires ou biopersistantes, comme l’étaient les fibres de l’amiante. Grâce à l’étiquetage rendu obligatoire par le règlement européen n° 1272/2008,  les laines de verre, de roche ou les mélanges contenant plus de 1% de fibres biopersistantes, sont classées potentiellement cancérigènes et possèdent le pictogramme suivant:

Les laines minérales certifiées ACERMI garantissent l’absence de fibre réfractaire.

L’origine végétale, animale, ou minérale de l’isolant ne peut constituer un critère unique de sélection. Il faut également tenir compte :

► de leurs performances techniques : thermique, acoustique, mécanique…

► de leur durabilité

► de leur facilité d’entretien

► de leur qualité architecturale

► de leur coût (à l’achat mais aussi pour leur entretien et renouvellement)

► et pour s’inscrire dans une démarche de développement durable (empreinte carbone) de leur lieu et mode de fabrication. Toutes ces informations sont données par l’analyse du cycle de vie (ACV), reprises dans les Fiches de Déclaration Environnementale et Sanitaire (FDES). Elles sont en accès libre, à partir du site inies.fr (la base de données n’est compatible qu’avec internet explorer ou mozilla)

Le saviez-vous ?

Le bois ne fait pas partie des meilleurs isolants phoniques ou thermiques disponibles sur le marché. Il répercute les vibrations sonores et possède une faible inertie. Par ailleurs le “tout bois” peut également être une source de pollution chimique. En effet l’OQAI a mis en évidence, dans les logements qui cumulaient, ossature en bois, mobilier en bois massif et isolant végétal à base de bois, des concentrations en héxaldéhyde (irritant), alpha-pinène et limonène (tous deux précurseurs de formaldéhyde) nettement supérieures par rapport aux autres logements.

2/ Spécificité de la zéolithe (ou zéolite)

Des isolants composés de zéolithe commencent à émerger sur le marché. Ce matériau minéral a la capacité d’adsorber les molécules chimiques, à l’instar du charbon. Il est vendu comme étant une parade au formaldéhyde. Bien que prometteur, comme tout matériau ou procédé se disant dépolluant ou purificateur, dès que l’on dépasse les conditions de test, leur efficacité et innocuité (à court et à long terme) dans des conditions réalistes d’utilisation, ne sont pas démontrées.

3/ Les revêtements de murs

Les peintures minérales sont les plus neutres. Cependant elles offrent peu de variétés, en termes de rendu (toujours mates). Le label Nature Plus est le spécialiste des peintures minérales.

Ce label, avec celui de l’Ange Bleu, sont les plus exigeants en matière d’émissions dans l’air intérieur de COV (Composés Organiques Volatils) et de COSV (Composés Organiques Semi-Volatils), dont font partie les phtalates et les retardateurs de flamme.

NF Environnement et l’Ecolabel européen sont un premier pas, mais ils peuvent être encore améliorés.

Pour tous les autres revêtements, vous pouvez vous reporter à l’étiquette environnementale “Emissions dans l’air intérieur” (obligatoire depuis le 1er septembre 2013), en essayant de privilégier les produits notés “A+”, ainsi qu’en regardant la teneur en COV Totaux et en choisissant la plus faible (<1 g/l).
Etiquette émission dans l'air

Dans les pièces présentant de l’humidité, comme une condensation sur les murs, le papier peint est à proscrire. En plus de gondoler et de se décoller, il constitue un support nutritif pour les moisissures. Une peinture est plus adaptée ou un revêtement à la chaux, qui évite justement la condensation sur les murs.

4/ Les revêtements de sols

Le carrelage et le béton sont inertes. Cependant, une attention peut être portée, vis-à-vis des joints utilisés (carrelage) et de la résine (béton ciré). L’étiquette “Emissions dans l’air intérieur” s’applique également pour les revêtements de sol. Elle permet d’opérer une première sélection de produits. De manière générale, il est préférable de poser (clouer, visser, clipser…) les revêtements de sols, plutôt que de les coller.

Les tapis, les moquettes synthétiques ou le jonc de mer, peuvent être une source de désagréments pour les personnes allergiques aux acariens. Privilégiez une simple pose ou une fixation avec un adhésif double face, plutôt que de les coller. Enfin concernant leur entretien, évitez au maximum le nettoyage à sec ou l’usage d’autres produits chimiques.

Les sols en plastique souple (PVC), communément appelé “lino” (≠ linoléum), peuvent poser des problèmes à cause de COSV – Composés Organiques Semi-Volatils. Les revêtements de ce type, produits en France ne contiennent plus les deux phtalates reconnus comme perturbateurs endocriniens : DEHP et DBP. Cependant ils ont été remplacés par deux autres phtalates : DINP et DIDP. La pertinence de cette substitution peut être questionnée. Dans les chambres d’enfants, les sols PVC ne sont pas les plus adaptés.

Le linoléum et marmoléum sont des sols, d’origine végétale, peu émissifs. Par contre ils sont fragiles, il convient de n’utiliser ni détergent agressif ni javel, au risque de les détériorer.

5/ Spécificité des panneaux en fibres de bois 

Contrairement aux autres matériaux, les produits à base de bois doivent faire l’objet d’une évaluation spécifique, concernant leurs émissions en formaldéhyde. Le bois est une source naturelle de formaldéhyde, qui est polluant cancérigène avéré des voies nasopharyngées, en plus d’être un irritant notoire. Pour être commercialisés dans l’Union Européenne, ils doivent appartenir à l’une des deux classes, E2 ou E1 (selon la norme NF EN 717-1). Depuis 2005, tous les panneaux de particules fabriqués en France sont de la classe E1 (la plus faible). Elle garantit une émission en formaldéhyde < 125μg/m3.

Certains fabricants proposent une classe E0,5. C’est une démarche volontaire, elle n’a aucune portée réglementaire. Les émissions sont alors divisées par deux (< 63µg/m3).

En parallèle, les labels Nature Plus et l’Ange Bleu proposent également des panneaux en fibres de bois. Ils certifient les dégagements en formaldéhyde, respectivement, <36μg/m3 et <60μg/m3.

6/ Ventilation – les débits d’air

Les débits d’air sont notifiés, soit par le règlement sanitaire départemental, pour les établissements recevant du public, soit par le code du travail, soit par l’arrêté du 24 mars 1982, pour les logements.

Dans l’habitat, l’arrêté du 24 mars 1982 a imposé le principe de ventilation générale et permanente. Avant 1982, les fuites de l’enveloppe assuraient une ventilation bon gré mal gré. Le principe de base, de la ventilation générale et permanente, consiste à faire entrer de l’air dans les pièces de vie (chambres et salon) et à l’extraire dans les pièces de service (salle de bain, wc et cuisine). L’air circule alors dans le logement par « balayage », à condition que les portes soient détalonnées (1cm d’espace entre le sol et le bas de la porte).

Le débit est calculé par rapport au nombre de pièces dans le logement. Par exemple un T3, avec une seule salle d’eau, devra avoir un débit d’extraction de 150 m3/h (105+30+15).

Débit d'air extrait

Afin d’éviter la mise en sous-pression (débit d’air extrait > débit d’entrée) ou sur-pression (débit d’air d’entrée > débit extrait) du logement, il est nécessaire de respecter la balance, entre l’air entrant et l’air sortant. Pour ce faire, le réseau hydraulique doit être correctement dimensionné, comporter le minimum de coudes et être étanche. De plus la circulation de l’air dans le logement ne doit pas dépasser la vitesse de 0,2 m/s, sinon cela génère un courant d’air perceptible et induit un inconfort thermique.

Enfin il est préférable d’opter pour des gaines rigides (ex : acier galvanisé) plutôt que des gaines souples en PVC ou en aluminium. Elles sont plus faciles à nettoyer et évitent la condensation. Par contre, les gaines rigides facilitent la propagation du bruit. Ainsi en présence d’une VMC, le moteur doit être conditionné dans un caisson adapté et insonorisé. Il peut également être suspendu et/ou fixé par des matériaux anti-vibratiles.

Pour le moment, il n’existe malheureusement pas de parcours professionnel de “ventiliste”. Un plombier, un électricien ou un chauffagiste peut vous l’installer de la meilleure ou de la pire des façons. Néanmoins les professionnels RGE – Reconnus garant de l’environnement, sont censés être des prestataires de qualité. L’annuaire est disponible sur le site: http://renovation-info-service.gouv.fr/trouvez-un-professionnel

7/ Ventilation – la filtration de l’air 

Sur une VMC (ventilation mécanique contrôlée) double flux, l’air insufflé passe au travers de filtres. Bien que non systématique, on retrouve souvent un filtre G4, dit grossier, afin de protéger le moteur. Toutefois il est possible de positionner derrière le filtre G4, des filtres plus fins, afin d’optimiser la qualité de l’air à l’intérieur du logement. Le filtre F7 est le plus utilisé, en complément d’un filtre G4, mais la pose d’un filtre F8 ou F9 peut également être envisagée, à condition de prendre en compte deux facteurs inhérents : la perte de charge et le colmatage (maintenance).

► La perte de charge

Tout ajout d’un filtre entraîne une perte de charge, qui implique elle-même, une augmentation de la consommation électrique du système. Plus les filtres sont fins (classe des F) et plus la perte de charge est importante.

► La maintenance

L’ajout de filtres implique également leur entretien (nettoyage et remplacement). A nouveau, cela représente un sur-coût. Les filtres de type G4 (G = grossier) doivent, en moyenne, être changés une fois par an. Les filtres M (moyens) ou F (fins) vont se colmater plus rapidement. Le colmatage entraîne, à son tour, une perte de charge supplémentaire. Le changement de ces filtres est de votre ressort (et de votre vigilance). 

Les centrales de traitement de l’air, généralement présentes dans les bâtiments tertiaires, peuvent indiquer, par un différentiel de pression, le moment où il est nécessaire de les changer.

Bibliographie

Abadie M et al. Mémento Santé Bâtiment – Qualité de l’air intérieur, Université de La Rochelle, Caisse des dépôts, 2013

Air Pays de la Loire, Prise en compte de la qualité de l’air intérieur dans l’aménagement des bureaux, 2015

Agence Qualité Construction, Matériaux bio-sourcés: 12 enseignements à connaitre, 2016

CETE Nord Picardie, Labels de la construction et Qualité sanitaire des bâtiments, Livrable 2: Prise en compte de la qualité sanitaire dans les labels “matériaux”, 2012

Fiches de déclaration environnementale et sanitaire, accessible sur le site de l’inies (seuls les navigateurs internet explorer ou mozilla permettent d’y accéder)

Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur, Qualité de l’air et confort dans les bâtiments performants en énergie, bulletin n°10, 2017