Les phtalates sont une classe de substances chimiques utilisées dans la production de plastiques, dans l’industrie pharmaceutique et cosmétique. On en dénombre plus d’une dizaine. Tous les phtalates ne sont pas suspectés d’être des perturbateurs endocriniens. Pour certains à cause d’un manque de données, le doute persiste. Pour d’autres, les études réalisées ne montrent pas d’effets délétères à ce jour.
Les plus étudiés, car les plus utilisés, sont au nombre de 6 :
- DEHP (di-2-éthylhexyl phthalate) – n°cas 117-81-7
- DIDP (di-isodecyl phthalate) – n°cas 68515-49-1 et 26761-40-0
- DINP (di-isononyl phthalate) – n°cas 68515-48-0 et 28553-12-0
- BBP (butyl benzyl phthalate) – n°cas 85-68-7
- DBP (di-butyl phthalate) – n°cas 84-74-2
- DNOP (di-n-octyl phthalate) – n°cas 117-84-0
Mais il existe de nombreux autres phtalates : DUP (di-undécyl phthalate); DEP (di-éthyl phthalate); DTDP (di-tridécyl phthalate); DIOP (di-isooctyl phthalate); DMP (di-methyl phthalate); DIPP (di-isopentyl phthalate); DPHP (bis 2-ethylhexyl).
Classification CMR – Cancérigène, Mutagène, Reprotoxique
Actuellement, aucune norme n’existe pour classer les perturbateurs endocriniens, à l’instar de la classification CMR définie par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC).
Seuls les perturbateurs endocriniens pouvant affecter la reproduction (reprotoxiques) peuvent entrer dans la classification du CIRC. Mais tous les perturbateurs endocriniens ne sont pas reprotoxiques. Par exemple, les perturbateurs endocriniens qui interférent avec la croissance et le développement d’un organisme ne répondent pas à cette classification.
Le DEHP a été classé en 2013 par le CIRC, dans le groupe 2B, où ses effets de perturbateurs endocriniens sur le système reproducteur sont “possibles”. Par contre le BBP, a lui été classé en 1999, dans le groupe 3 “non classifiable”, ce qui signifie qu’aucune donnée probante ne peut l’accuser ou l’innocenter d’être un perturbateur endocrinien.
Même si tous les phtalates ne suscitent pas les mêmes préoccupations, certains considérés comme “potentiellement dangereux pour la santé” ont été interdits par l’Union Européenne, que ce soit dans les cosmétiques ou les jouets (cf. Utilisations des phtalates).
Effets suspectés
Outre les troubles de la reproduction, le Réseau Environnement et Santé a publié en 2012, un dossier sur les effets observés chez l’humain [4]. On retrouve des troubles du métabolisme “certains phtalates pourraient jouer un rôle dans la genèse du diabète”, une implication dans le développement de cancers du sein, des testicules… Pour plus d’information, je vous invite à lire la publication.
Utilisation des phtalates
Ils sont très utilisés dans
- les cosmétiques
Les phtalates sont utilisés comme agents fixateurs, afin d’augmenter le pouvoir de pénétration d’un produit sur la peau ou empêcher le vernis de craquer (les cosmétiques seraient le 2ème domaine d’application des phtalates) [4]
Le règlement européen (n°1223/2009, du 30 novembre 2009), interdit la présence de 8 phtalates dont le DEHP, DBP et BBP. Et de manière plus générale, ce règlement interdit toutes substances CMR classées 1, 2A ou 2B.
- Le matériel médical
Les tubes ont besoin d’être fins et souples, surtout pour le matériel utilisé en néonat, pour le moment aucun substitut n’est valable.
- Certains jouets en plastique et les articles de puériculture
Attention tous les jouets en plastique ne contiennent pas des phtalates! 60 millions de consommateurs à tester 25 jouets, dont 9 d’entre eux contenaient un ou plusieurs phtalates, à des concentrations supérieures à 0,1% du poids total du jouet. Parmi les 9 jouets avec phtalates : 4 d’entre eux contenaient des phtalates jugés inquiétants comme le DEHP, BBP et DBP; et 5 contenaient des phtalates non identifiés à ce jour comme possible perturbateur endocrinien.
La législation européenne interdit l’utilisation de DEHP, DBP et BBP dans la fabrication de jouets et d’articles de puériculture pour les enfants de moins de 36 mois (directive 2005/84/CE et confirmée par la directive 2009/48/CE). Cette directive a été élargie à un autre groupe de phtalates : DINP, DIDP et DNOP. Soit 6 phtalates interdits dans les jouets et articles de puériculture pour les enfants de moins de 36 mois.
Malheureusement comme pour le bisphénol A (BPA), parfois la substitution se fait avec un composé de la même famille. Bien que non encouragée par l’Union Européenne, les 6 phtalates interdits peuvent « éventuellement » être remplacés par le DPHP (bis 2-ethylhexyl), un autre phtalate. « La Commission européenne a toutefois informé les parties concernées et les autorités que l’utilisation de cette substance pourrait être réglementée à l’avenir dans toute l’Union européenne s’il apparaît, eu égard aux informations qui seront collectées, qu’elle cause des risques inacceptables pour la santé humaine ou l’environnement. » (directive 2009/48/CE)
NB : au sens de la directive “interdit” signifie que les 6 phtalates ne peuvent pas être présents à des concentrations supérieures à 0,1% en poids de matières plastiques dans les jouets et articles de puériculture.
Autrement dit, si on détecte dans un jouet, une concentration de DEHP de 0,05% du poids total. Le jouet sera autorisé. Le risque zéro n’existe pas, car il est impossible de garantir la pureté d’un produit, que ce soit un jouet, un cosmétique, un vêtement… D’autant plus que les limites de détection des appareils de mesures sont tellement fines, qu’on peut détecter des polluants à l’état de trace, sans pour autant être capable de les quantifier.
Cette limite de 0,1% est également appliquée pour les aliments sans OGM : “garantit à 99,9% sans OGM”.
- Les matériaux en PVC, identifiés sous le n°3
On retrouve, entre autres, les revêtements de sol en PVC, nommés communément “lino”. Le véritable linoléum est lui, constitué de toile de jute imprégnée d’huile de lin.
Comment reconnaître le “lino PVC” du vrai linoléum, en lisant l’étiquette et surtout au prix!
Voies d’exposition
Les phtalates sont pour la plupart biodégradables, mais à cause de leur propriété lipophile, ils tendent à migrer de leurs emballages plastiques vers les produits alimentaires (lait, fromage, poissons, viandes, margarines…) [2]. Ainsi la première voie d’exposition est l’alimentation.
Puis la deuxième voie d’exposition est le contact cutané, suite à la manipulation d’articles en PVC (jouets, sols…).
Enfin la dernière voie d’exposition et la plus faible, est l’inhalation, car les phtalates sont peu volatils. Ils font partie de la famille des COSV (Composés organiques semi-volatils). Le risque réside dans la respiration de poussières, qui contiendraient des phtalates.
Bibliographie :
[1] 60 Millions de Consommateurs, Trop de toxiques sous le sapin, n°444, décembre 2009.
[2] INRS, Les phtalates, ED5010, avril 2004
[3] Règlement européen n°1223/2009, du 30 novembre 2009, annexe II : Liste des substances interdites dans les produits cosmétiques
3 Commentaires
Pingback:
Pingback:
Pingback: