Faire peur pour faire accepter des prix de vente plus élevés. Faire peur pour inciter à choisir ses produits. La peur est devenue un argument marketing comme un autre. Elle est utilisée par certaines marques pour convaincre les consommateurs que leur produit est meilleur et que les prix élevés sont justifiés.
L’information doit être courte et percutante
À simplifier toujours plus l’information, on oublie totalement que tout est dans la nuance. Que ce soit un sujet de santé, d’économie, de politique, absolument tout est une question de nuances. La solution miracle n’existe pas. Une réponse simpliste à un problème complexe n’entraîne que la peur, la haine et la méfiance.
Sans Yuka et FoodWatch, les charcutiers et charcutières auraient continué à nous empoisonner avec les sels de nitrate et nitrite. Quelle blague ! En 2010, le Centre International de Recherche sur le Cancer classait déjà les nitrates et nitrites ingérés, dans la catégorie 2A, c’est-à-dire “cancérigène probable pour l’homme”. La classification n’est pas au niveau de “cancérigène avéré”, car c’est seulement une fois ingérés sous certaines conditions que les nitrates et nitrites peuvent être transformés (métabolisés) en d’autres substances chimiques de la famille des nitrosamines, dont certaines sont des cancérogènes avérées.
Autre exemple, lors d’un café entre collègues ou un apéro entre amis, posez la question : “est-ce que les sels d’aluminium contenus dans les déodorants présentent un risque avéré dans le développement des cancers du sein“. La majorité vous répondra pas l’affirmatif, tout en vous disant que la pierre d’Alun est une bonne alternative alors qu’elle-même est un sel d’aluminium (qui peut être d’origine naturelle ou de synthèse).
Un marketing de la peur dirigée vers les femmes
Déjà que nous payons plus cher nos produits d’hygiène par rapport à nos comparses masculins : la taxe rose. Nous sommes, en plus, la première cible du marketing de la peur.
Cet article je le dois à une publicité pour des “tampons bio” dont le prix est 3 fois plus élevé que les tampons de marques distributeurs que j’achète habituellement. Dans leur publicité qui circulait sur les réseaux sociaux, les mots : “toxique”, “résidus de pesticides”, “perturbateurs endocriniens” s’enchainaient et s’associaient aux mots “muqueuse”, “fertilité”, “cancer”. Une intention claire de faire flipper. Les fondatrices diraient plutôt qu’elles alertent, tout en sachant qu’une entreprise (dont la leur) n’est ni une association de consommateurs, ni une fondation.
La première faiblesse dans leur discours est d’oublier l’adjectif qualificatif essentiel : avéré; probable ou possible. Un perturbateur endocrinien avéré ou un cancérogène avéré sont, par principe, interdits par les différentes règlementations en vigueur, notamment dans les cosmétiques et produits d’hygiène. Il peut exister des dérogations selon les secteurs d’activité, lorsque l’industriel peut prouver qu’il n’existe pas de substitut et que la substance est essentielle. Nuance.
La deuxième faiblesse est d’omettre délibérément que même un produit bio peut contenir des traces et des résidus de pesticides. Encore une fois la nuance.
Par contre leur force incontestable est de toujours utiliser le conditionnel ou le verbe pouvoir : “peut causer”, “peut entraîner des effets néfastes”. Comme tout est possible et que le risque zéro n’existe pas, leur pub est intouchable. L’art de la nuance quand ça les arrange !
Le bio n’est pas exempt de pesticides
On le dit et redit, l’agriculture biologique autorise des pesticides. Les phytosanitaires d’origine naturelle sont autorisés en agriculture biologique. Les plus utilisés sont le soufre et le cuivre (des métaux lourds), le spinosad (une toxine issue de bactéries), les pyréthrines (substances chimiques dérivées des fleurs de pyrèthre)… Les pesticides autorisés en agriculture biologique sont listés en annexe II du règlement CE n°889/2008. Seuls les phytosanitaires de synthèse sont interdits et utilisés en agriculture conventionnelle.
Un produit est bio si en cas de contrôle, la quantité de résidus de pesticides est strictement inférieure à la limite de quantification (LQ ou LOQ) fixée à 0,01 mg/kg. Mais en aucun cas, cela signifie 0% de résidus. On trouvera toujours des traces, d’autant plus qu’on est capable de quantifier des nanogrammes (10−9g) et des picogrammes (10−12g). Nuance.
L’EFSA – Européen Food Safety Authority publie chaque année les résultats des analyses effectuées sur des produits agro-alimentaires issus de l’agriculture biologique et conventionnelle. Dans le rapport approuvé en février 2021, les données 2019 donnent :
- 12 catégories de produits ont été testés, soit 12.579 échantillons analysés de pommes, pêches, fraises, tomates, épinards, choux, salades, orge, blé, vin rouge et blanc, lait de vache, graisse de porc.
- Parmi les 12.579 échantillons analysés, 182 résidus de pesticides ont été recherchés.
- 10 pays de l’Union Européenne ont participé aux mesures.
Les résultats montrent, pour chaque catégorie de produits, le pourcentage de résidus de pesticides quantifiables. Les pourcentages sont significativement plus faibles en agriculture bio qu’en conventionnelle. Par exemple, pour les fruits et les oléagineux 63,2% des échantillons en agriculture conventionnelle contiennent des résidus de pesticides quantifiables contre 9,9% pour les mêmes produits en agriculture bio. Mais les produits bio ne sont pas exempts de résidus de pesticides. Nuance.
Un environnement pollué
Le constat est là, depuis la révolution industrielle nous polluons massivement notre environnement.
Est-ce que c’était mieux avant ?
Non, mais nous vivions dans l’ignorance. L’exposition aux particules fines existe depuis que l’Homme a réussi à faire du feu. La population de la Rome antique était exposée à des concentrations toxiques de plomb via les revêtements des céramiques. L’une des premières tumeurs osseuses a été découverte sur une momie égyptienne.
Ce qui a changé est le traitement de l’information. Aujourd’hui un pic de pollution atmosphérique alimente les chaînes d’info en continu. Des associations en mal d’adhérents font des “opérations coup de poing”, où ils vont chercher des traces de bisphénol A dans des échantillons sanguins de volontaires. Et vous savez quoi ? Ils en trouvent parce que notre environnement est imprégné. Nous sommes imprégnés.
Il faut savoir que les outils les plus performants peuvent détectés des concentrations de l’ordre du picogramme (pg), 10−12 gramme, c’est un milliard de fois plus faible que le milligramme.
L’interdiction des substances toxiques
Si on doit interdire tous les produits néfastes pour la santé, alors oublié la cigarette, la chicha, tous les alcools, toutes les viandes rouges, la charcuterie bien sûr, tous les bonbons, les sodas et les jus de fruits même 100% pure jus, mise à part du plaisir, ils n’apporte rien d’essentiel à notre organisme. Oublié également la friture, les cuissons au barbecue…
Il faut aussi arrêter les secteurs de l’industrie automobile et électronique, le BTP… qui utilisent et produisent des substances toxiques !
Terminez également l’extraction d’huiles essentielles car elles sont trop puissantes et, mal utilisées, elles peuvent être dangereuses.
Bref vous percevez l’absurdité et l’art de la nuance. On se rend bien compte que tout est dans la modération.